Les transformations de la structure de l’État et des modalités d’intervention de l’action publique appellent à renouveler les cadres d’analyse. Comment analyser la « recomposition de l’État » pour mettre en évidence le maintien de son autonomie d’action face à l’éclatement des centres de décision entre acteurs privés / publics et entre niveaux de territoire selon des échelles enchevêtrées et imprévisibles? Cet article propose une perspective constructiviste qui intègre les transformations de « l’être de l’État » et le « faire de l’État » dans le secteur de la politique universitaire : depuis 1988, les universités ont suivi des trajectoires très différentes dans les deux communautés, flamande et francophone, au point que le territoire belge présente aujourd’hui deux régimes politiques d’enseignement supérieur et de recherche (ESR). L’État est une structure cognitive qui s’inscrit dans des dispositifs concrets : si les discours politiques contribuent à définir les conceptions légitimes et mobilisables pour justifier un certain exercice du pouvoir, c’est au niveau de leurs traductions pragmatiques au sein des dispositifs de gouvernement que se donne à lire une certaine « théorie de l’action » qui propose et légitime le problème politique à résoudre et les modalités d’ intervention publique [Rose & Miller, 1992]. Les dispositifs de régulation et d’évaluation des universités sont des instruments d’action publique [Lascoumes et Le Galès 2004] : au-delà des dimensions instrumentales et techniques, ils contribuent à structurer le champ politique suivant une logique propre. Dans ces formes de coopération, les acteurs participent au processus de « normativité » [Macherey, 2009] et se réapprorient ces dispositifs, tantôt en résistant, tantôt en les reformulant. En analysant au plus près des acteurs quelques dispositifs récents en matière de gestion de la qualité universitaire et de régulation du financement public de la recherche, cette approche comparée contribue à mettre au jour les dynamiques spécifiques de ...