L’actualité questionne bruyamment les rapports entre religion, genre et sexualité. Grâce à un croisement entre sources orales et archivistiques, l’historien·ne a accès à des éléments dont nous héritons dans une Belgique longtemps restée un bastion catholique. Ma communication souhaite exposer les différences sexospécifiques mises en avant dans l’éducation sexuelle et affective des jeunes catholiques des années soixante. En partant des « cours de préparation au mariage » d’un mouvement de jeunesse d’Action Catholique, les Jeunesses Indépendantes Catholiques Féminines (JICF), il est possible de percevoir comment les révolutions sexuelles viennent travailler de l’intérieur le catholicisme belge. Alors que la réflexion magistérielle de Vatican II se porte sur la question des femmes, la sexualité juvénile se transforme. Le mariage d’amour devient la norme et rend inévitables les contacts mixtes et une exploration mutuelle préconjugale. Dans une vision essentialisée des hommes et femmes « différents mais complémentaires », la JICF expose longuement les natures genrées à ses membres. Ces exposés doctrinaux visent deux objectifs. D’abord, la démystification du sexe opposé : si les jeunes filles ne connaissent pas l’autre sexe, elles peuvent mettre en échec la spiritualité du mariage attendue. Ensuite, la réaffirmation de la différence soutient un système d’opposition où la vocation féminine est reproductive et domestique. L’étude approfondie prouve les difficultés spécifiquement catholiques à négocier le bouleversement mixte. La jeunesse glisse d’une binarité hermétique à un système parallèle, mais partage finalement peu de choses en dehors des contacts amoureux. Tout le discours moral de condamnation de la confusion entre les genres semble entrer en tension avec la volonté pratique de la JICF d’éduquer ses jeunes filles dans un contexte où elles cohabitent avec des garçons au quotidien. Comment les cours de la JICF enseignent-ils aux jeunes filles « l’égalité dans la différence » ? « La » femme semble y être plus ...